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« Je me dois de raconter mon histoire » : donner davantage de voix aux souvenirs des survivants de l’Holocauste grâce à la technologie

Inge Auerbacher

« C’est un miracle que je sois en vie », Inge Auerbacher, aujourd’hui âgée de 88 ans, a été confrontée aux atrocités de l’Holocauste alors qu’elle n’avait que sept ans. Réchappée du ghetto de Theresienstadt, en Tchécoslovaquie occupée, elle consacre sa vie, depuis la fin de la guerre, à former aux dangers de l’intolérance et de la haine. Elle a écrit de nombreux livres, poèmes et chansons et intervient dans des écoles et des universités. Ce n’est que récemment qu’elle a découvert ce que les nouvelles technologies peuvent apporter.

Souhaitant que ses souvenirs lui survivent, Inge a décidé d’entrer dans le monde numérique afin de permettre aux générations futures d’interagir avec elle, même après sa disparition. Son histoire emplie de souffrance, de résilience et d’espoir a donc été transformée en réalité virtuelle dans le cadre d’un nouveau projet pédagogique, « Tell Me, Inge… » (« Inge, raconte-moi… »), fruit d’un partenariat entre Meta, Storyfile, l’UNESCO, le Congrès juif mondial et la Claims Conference. Cette expérience en ligne gratuite combine l’intelligence artificielle (IA) conversationnelle et la réalité virtuelle. Elle reconnaît la voix des utilisateurs et simule une interaction réelle, permettant aux internautes de poser des questions et d’écouter les réponses d’Inge, accompagnées d’animations multidimensionnelles à 360°.

Ce projet intervient à un moment où le souvenir de l’Holocauste se fragilise de plus en plus. Près de 80 ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, les enquêtes révèlent que les jeunes générations ont des connaissances très lacunaires à ce sujet, voire qu’elles font preuve d’indifférence. Bien que l’Holocauste soit l’un des génocides les plus étudiés de l’histoire, sa réalité historique continue d’être niée ou déformée, y compris en ligne, où les discours haineux, la désinformation et les théories du complot pullulent et jettent souvent de l’huile sur le feu.

Proposer des orientations mondiales sur l’enseignement de l’histoire de l’Holocauste

« Chaque jour, les rescapés de l’Holocauste sont de moins en moins nombreux à pouvoir témoigner sur le chapitre le plus sombre de l’histoire de l’humanité. Alors que les technologies numériques progressent rapidement, nous devons les utiliser de manière réfléchie et éthique et concevoir de nouveaux outils qui aideront les jeunes générations à mieux s’approprier le passé », a déclaré Karel Fracapane, spécialiste de programme à l’UNESCO. « L’Organisation s’est engagée à commémorer les victimes de l’Holocauste, à transmettre la voix des rescapés aux générations futures et à promouvoir des politiques pédagogiques et mémorielles efficaces. Grâce à l’éducation, nous pouvons évoluer vers une société caractérisée par la paix, la compréhension et le respect de la dignité humaine, en dépit de la haine et des préjugés. »

Dans ce contexte, l’UNESCO chapeaute les efforts mondiaux visant à renforcer la pertinence, la qualité et les effets de l’enseignement de l’histoire de l’Holocauste dans le monde entier. Des approches innovantes telles que « Tell Me, Inge… » peuvent servir de tremplin pour apporter aux apprenants des sources historiques fiables et approfondir leur compréhension de la dynamique et des conséquences de la haine.

Grâce au Programme international sur l’enseignement de l’histoire de l’Holocauste et des génocides, l’UNESCO aide les enseignants et les décideurs du monde entier à élaborer des séquences pédagogiques à ce sujet. Mis en œuvre conjointement avec le Musée du mémorial de l’Holocauste des États-Unis depuis 2015, ce programme a bénéficié à 24 pays et débouché sur des initiatives pédagogiques sur mesure, adaptées aux publics et aux besoins locaux. Ces initiatives comprennent l’élaboration de politiques pédagogiques et la formation des enseignants, la mise à jour des programmes et des supports d’enseignement, des campagnes de sensibilisation ainsi que d’autres projets visant à aborder les passés violents par le biais de l’éducation.

Protéger l’Histoire des attaques en ligne et hors ligne

Le spectre de la déformation et de la haine en ligne plane constamment sur les souvenirs de rescapés de l’Holocauste comme Inge. À l’ère numérique, les informations fausses ou trompeuses sur l’Holocauste se répandent plus vite qu’une traînée de poudre, accentuant les préjugés et les stéréotypes antisémites, voire, dans le pire des cas, réhabilitant et justifiant des idéologies violentes. Pour y remédier, l’UNESCO encourage le dialogue mondial avec les plates-formes numériques et d’autres parties prenantes afin de renforcer la transparence et la responsabilisation, de lutter contre les théories du complot et les discours de haine et de bâtir un monde en ligne qui protège les droits humains. Ces travaux consistent notamment à :

  • élaborer des orientations visant à réguler les plates-formes numériques afin de faire disparaître les contenus préjudiciables en ligne, tout en protégeant la liberté d’expression ;

  • promouvoir l’utilisation éthique de l’IA et des nouvelles technologies ; par exemple, l’UNESCO est en train d’élaborer un dossier sur l’utilisation de l’IA dans l’enseignement de l’histoire de l’Holocauste ;

  • lancer des campagnes de sensibilisation avec des partenaires internationaux ; en collaboration avec le Congrès juif mondial, l’Organisation a créé le site web AboutHolocaust.org, disponible en 19 langues, qui fournit des réponses factuelles aux questions courantes sur l’histoire de l’Holocauste ; les plates-formes numériques renvoient à cette ressource lorsque les internautes effectuent une recherche sur l’Holocauste et des mots-clés apparentés.

En savoir plus sur les activités de l’UNESCO en matière de :