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Les femmes parlementaires africaines s’inspirent du projet « The Chilling » de l’UNESCO pour lutter contre les cyberattaques

La liberté de la presse reste une préoccupation mondiale, un journaliste étant tué tous les quatre jours, ce qui constitue la forme ultime de censure. Les femmes journalistes sont particulièrement vulnérables aux agressions sexistes, notamment au cyberharcèlement.
African Women Parliamentarians Learn from UNESCO’s The Chilling

Le rapport de l’UNESCO, « The Chilling », basé sur une enquête menée auprès de plus de 900 journalistes de 125 pays, révèle le lien inquiétant entre désinformation, misogynie, discrimination et montée en flèche de la cyberviolence à l’encontre des femmes journalistes.

Le 18 septembre 2023, en Tanzanie, une trentaine de femmes parlementaires d’Afrique se sont réunies pour un dialogue de haut niveau. L’objectif était d’établir des parallèles entre la cyberviolence à l’encontre des femmes journalistes et les expériences des femmes politiques, tout en élaborant des réponses efficaces à ce problème croissant. Le dialogue a coïncidé avec la Journée internationale de la démocratie, célébrée le 15 septembre.

Au cours de la discussion, des femmes parlementaires de différents pays africains ont fait part de leurs expériences de cyberviolence, de son lien avec le harcèlement et la violence hors ligne, et du besoin urgent de reconnaissance et d’action.

L’événement était organisé par l’UNESCO et l’honorable Neema Lugangira, membre du Parlement tanzanien et Présidente fondatrice du Réseau parlementaire africain sur la gouvernance de l’Internet. Organisé à la fois en Tanzanie et en ligne avec la participation de toute l’Afrique, il a souligné l’importance de lutter contre la cyberviolence à l’encontre des femmes politiques, en particulier dans le contexte des élections à venir dans plusieurs pays africains.

Les femmes politiques et journalistes sont confrontées à des attaques similaires

Dans le monde entier, les hommes politiques sont de plus en plus souvent la cible de menaces et d’abus en ligne, en particulier lors des élections, lorsque les plateformes numériques sont utilisées pour diffuser des contenus haineux dans le but d’influencer le processus électoral.

De plus en plus d’éléments montrent que les femmes politiques sont particulièrement visées. Des recherches menées par l’Union interparlementaire ont mis en évidence des types spécifiques de cyberharcèlement et les effets psychologiques de l’humiliation, de l’intimidation et d’autres menaces sur les réseaux sociaux. Ces attaques ont de graves conséquences sur la santé physique et mentale, conduisant souvent les femmes à s’autocensurer, voire à quitter leur poste.

Les femmes politiques contribuent considérablement au développement économique, social et politique. Pourtant, nous sommes constamment exposées à des niveaux élevés d’abus en ligne qui ont aussi des effets préjudiciables hors ligne. La société attend de nous que nous développions une carapace, mais pourquoi certains devraient-ils être autorisés à se comporter différemment en ligne que hors ligne ? Si nous voulons parvenir à l’égalité des sexes, nous avons besoin de femmes politiques et de femmes parlementaires en ligne.

Hon. Neema LugangiraMembre du Parlement tanzanien et Présidente fondatrice du Réseau parlementaire africain sur la gouvernance de l’Internet

Les expériences de cyberviolence partagées par les femmes politiques reflètent étroitement celles auxquelles sont confrontées les femmes journalistes dans le monde entier. L’UNESCO a présenté son travail sur la sécurité des femmes journalistes au cours de l’événement, notamment les résultats du projet The Chilling. Ce projet de recherche de pointe a montré que près de 73 % des femmes journalistes interrogées avaient été confrontées à la cyberviolence dans le cadre de leur travail. En outre, des études de cas évaluant plus de 2,5 millions de messages sur les réseaux sociaux visant des personnalités telles que Maria Ressa (lauréate du Prix mondial de la liberté de la presse 2021 Guillermo Cano) et Carole Cadwalladr (The Guardian) ont révélé l’impact réel des cyberattaques et leurs liens avec d’autres formes de discrimination telles que le racisme, l’homophobie et le fanatisme religieux.

Depuis la publication de The Chilling, l’UNESCO a collaboré avec des agences de l’ONU, des organisations de la société civile et des salles de rédaction pour élaborer des recommandations, des cadres juridiques et des initiatives de sensibilisation afin de mieux prendre en compte l’impact de la cyberviolence sur la sécurité des femmes journalistes.

Ce dialogue montre la pertinence des résultats de The Chilling pour la discussion avec les femmes parlementaires confrontées à des cyberattaques très similaires. Cela renforcera et alimentera certainement notre travail avec les parlementaires du monde entier et notre travail sur les élections, ainsi que la façon de gouverner le cyberespace, en luttant contre les contenus néfastes tout en protégeant la liberté d’expression. 

Guilherme CanelaChef de la Section Liberté d’expression et Sécurité des journalistes, UNESCO

Collaboration de l’UNESCO avec les parlementaires

La coopération de l’UNESCO avec divers acteurs, tels que les acteurs judiciaires et les forces de sécurité, en vue de protéger les journalistes et de promouvoir la liberté d’expression, s’est récemment étendue aux professionnels de l’administration électorale et aux législateurs.

En février 2023, l’UNESCO et l’Union interparlementaire (UIP) ont organisé une discussion sur le rôle des décideurs politiques et des régulateurs dans la promotion d’une approche basée sur les droits pour la régulation des plateformes numériques. Les femmes parlementaires ont partagé leurs expériences concernant les cyberattaques et les responsabilités des entreprises numériques pour relever ce défi. Cet événement s’est inscrit dans le cadre de la conférence de l’UNESCO « Pour un Internet de confiance », qui se concentre sur les principes de régulation des plateformes numériques afin de préserver la liberté d’expression et l’accès à l’information.

L’UNESCO et l’UIP ont récemment formé un partenariat pour les activités à venir, notamment des formations et des ateliers en ligne sur les normes internationales en matière de liberté d’expression et de sécurité des journalistes, et le renforcement des capacités des acteurs législatifs à protéger les journalistes.

À ce jour, plus de 11 500 agents des forces de l’ordre et 35 000 acteurs judiciaires, dont des juges, des procureurs et des avocats, ont reçu une formation de l’UNESCO et de ses partenaires par le biais de cours en ligne ouvert à tous (MOOC), de formations sur site, d’ateliers et de boîtes à outils.

Rule of law

Initiative de l’UNESCO pour la formation des juges

Safety of women journalists

Programme de l’UNESCO sur la sécurité des femmes journalistes

The Chilling : Tendances mondiales de la violence en ligne contre les femmes journalistes ; document de réflexion de recherche
Posetti, Julie
UNESCO
Shabbir, Nabeelah
Maynard, Diana
Bontcheva, Kalina
Aboulez, Nermine
2021

Avec le soutien financier du Programme multidonateurs de l’UNESCO sur la liberté d’expression et la sécurité des journalistes et de la Swedish Postcode Foundation.

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