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L'UNESCO organise une première formation sur le droit à la vie privée, la protection des données et la liberté d’expression destinée aux commissaires à la vie privée

L'UNESCO, en partenariat avec l’Assemblée mondiale pour la protection de la vie privée (AMVP) et l'Institut national mexicain pour la transparence, l'accès à l'information et la protection des données personnelles (INAI), a co-organisé un atelier de formation d'une journée sur le droit à la vie privée, la protection des données et la liberté d'expression destiné aux commissaires à la vie privée. La formation a eu lieu le 2 mai à Punta del Este, en Uruguay, dans le cadre de la Conférence de la Journée mondiale de la liberté de la presse, célébrée le 3 mai.
Privacy commissioners

Cette toute première formation sur les interconnexions entre le droit à la vie privée, la protection des données et la liberté d’expression a réuni 9 commissaires à la vie privée d'Afrique, de la région arabe, d'Asie et d'Amérique latine, ainsi que la Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur le droit à la vie privée, Mme Ana Brian Nougrères.

Au cours de l'atelier, les intervenants ont examiné des études de cas pertinentes et d'importantes décisions des tribunaux régionaux des droits de l'homme, engageant les participants dans une réflexion sur la façon dont le droit à la vie privée, le droit à l’information et le droit à la liberté d’expression sont tous profondément corrélés. Dans le monde numérisé d'aujourd'hui, les nouvelles technologies définissent progressivement la manière dont les citoyens se rapportent à l'information, et présentent souvent des situations où l'équilibre entre droit à la vie privée et liberté d’expression doit être soigneusement examiné. La collecte de données, quant à elle, affecte les droits individuels, car les données sont continuellement collectées pour, entre autres, des raisons d'analyse économique. La protection des données est donc pertinente pour préserver un éventail considérable de droits et de valeurs, de l'autodétermination à la non-discrimination, en passant par la liberté d’expression.

La nécessité de considérer ces droits comme complémentaires plutôt qu'opposés a été soulignée par Blanca Lilia Ibarra Cadena, Présidente de l'Assemblée mondiale pour la protection de la vie privée (AMVP) et Commissaire de l'Institut national mexicain pour la transparence, l'accès à l'information et la protection des données personnelles (INAI) :

En tant que représentants des institutions publiques qui exercent des fonctions d'autorité en matière de protection des données personnelles, nous devons rester très attentifs aux avancées et aux nouveaux défis qui sont apparus en la matière, ainsi qu'à leurs effets à court et à long terme sur l'exercice d'autres droits et libertés fondamentaux. [...] Il est donc nécessaire d'adopter une approche globale pour examiner les liens qui existent entre droit d'accès à l’information, exercice de la liberté d’expression et protection du droit à la vie privée. 

Blanca Lilia Ibarra Cadena

Dans son discours d'ouverture, Guilherme Canela, Responsable de la Section Liberté d’expression et Sécurité des journalistes, a attiré l'attention sur l'importance de renforcer les connaissances et les capacités des acteurs judiciaires et des commissaires à la vie privée sur ces droits de l'homme essentiels :

Cet atelier est [donc] l'occasion d'associer pour la première fois à la discussion les commissaires à la vie privée, qui sont les principaux garants de ces droits. Il servira de moteur de dialogues ouverts entre les commissaires à la vie privée de différentes régions du monde, favorisant ainsi l'échange de bonnes pratiques et la création d'un réseau d'experts pour renforcer le respect de ces droits fondamentaux à l'échelle mondiale. 

Guilherme Canela

La formation a également été l'occasion pour Dr Lida Ayoubi, maîtresse de conférences à la faculté de droit de l'Université technologique d'Auckland, en Nouvelle-Zélande, de présenter, via une vidéo enregistrée, les dernières tendances et les défis en matière de droit d'accès à l'information et de respect de la vie privée.

L'atelier a servi de moteur d’un dialogue ouvert entre les commissaires à la vie privée du monde entier, favorisant ainsi l'échange de bonnes pratiques et la création d'un réseau d'experts pour renforcer le respect de ces droits fondamentaux à l'échelle mondiale.

La Commissaire de l’organisme de régulation de l'information en Afrique du Sud, Mme Hellen Shube, a déclaré : « Le séminaire a été très instructif et révélateur. Les principes partagés sur l'équilibre entre le droit à la vie privée et la liberté d'expression ont été perspicaces ».

L'atelier a également été l'occasion de lancer officiellement les Lignes directrices de l'UNESCO à l'intention des acteurs judiciaires sur la vie privée et la protection des données, qui seront disponibles dans toutes les langues de l'ONU et en portugais. Les Lignes directrices, élaborées par Danilo Doneda, avocat et professeur de droit à l'IDP et Coordinateur du Centre for Internet, Law, and Society de l’IDP, qui a également été le formateur de l'atelier, ont pour but de fournir un cadre général permettant aux acteurs judiciaires d'évaluer les questions relatives au respect de la vie privée et à la protection des données au regard d'autres droits, tels que la liberté d’expression et le droit à la vie privée, ainsi que les défis liés au respect de ces droits face aux nouvelles technologies.

Outre cette formation, l'UNESCO a également coopéré avec l’initiative Global Freedom of Expression de l'Université de Columbia afin d'élargir son recueil en ligne de jurisprudence sur les affaires liées au respect de la vie privée, à la liberté d’expression et à la sécurité des journalistes dans le monde. En particulier, 22 affaires relatives au respect de la vie privée, émanant de différents tribunaux du monde, ont été ajoutées à la base de données jurisprudentielle déjà très complète. Ces affaires permettent de mettre en lumière les différentes tensions et les renforcements mutuels qui existent entre la liberté d’expression et le respect de la vie privée.

La publication des Lignes directrices de l'UNESCO à l'intention des acteurs judiciaires sur la vie privée et la protection des données, ainsi que l'organisation de l'atelier de formation pour les commissaires au respect de la vie privée ont été soutenues par le Programme multidonateurs sur la liberté d'expression et la sécurité des journalistes de l'UNESCO, ainsi que par la Fondation Open Society.

L'atelier de formation des commissaires à la vie privée s'est inscrit dans l’Initiative de l’UNESCO pour la formation des juges qui vise à renforcer les capacités des acteurs judiciaires à promouvoir la liberté d’expression et la sécurité des journalistes, en assurant la poursuite et le jugement des responsables d'attaques contre les journalistes, ainsi que plus largement à prévenir les actions indiscriminées contre la liberté d'expression. Dans ce contexte, depuis 2013, l’Initiative de l’UNESCO pour la formation des juges a renforcé les compétences des acteurs judiciaires en matière de normes internationales et régionales sur la liberté d'expression, l'accès à l'information et la sécurité des journalistes dans plus de 150 pays à travers le monde. Plus de 23 000 acteurs judiciaires, dont des juges, des procureurs et des avocats, ont été formés à ces questions, notamment par le biais d'une série de cours en ligne ouvert à tous (MOOC), de formations et d'ateliers sur le terrain, mais aussi de publications d'un certain nombre de trousses à outils et de lignes directrices.