Habitante du village de Toubacouta situé dans le Sine-Saloum au Sénégal, Aïssata est une jeune fille de 18 ans de la classe de Terminale scientifique. À l'âge de 11 ans, elle découvre le Centre d'Interprétation du Delta du Saloum, mis en place avec l’appui de l'UNESCO à travers le projet MDG-F. Fréquentant la petite bibliothèque du centre depuis lors, elle s’est très vite passionnée pour les activités ludiques et instructives ouvertes aux jeunes dans cet espace d’information. Aïssata par la suite décide de rejoindre le club nature où les jeunes sont actifs dans la préservation de la nature par la pratique du théâtre, de la musique, etc. Avec le temps, sa passion s'est transformée en un engagement plus profond : celui de travailler aux côtés d'autres jeunes pour sensibiliser leur communauté à la protection de la nature et à la sauvegarde du Delta du Saloum, site précieux du patrimoine mondial.
Je mène aussi des activités avec les enfants de 8 à 12 ans à qui je transmets les connaissances acquises en matière de protection et sauvegarde de l’environnement.
Le Centre d’Interprétation du Delta du Saloum, un outil d’information et de formation
Le Delta du Saloum, avec une superficie de 5000 km² est inscrit depuis 2011 sur la liste du Patrimoine mondial de l’UNESCO en tant que paysage culturel. Cette merveille naturelle, formée des bras de trois fleuves d'eau saumâtre, composée de près de 200 îles et îlots, de mangroves et parsemée de 218 amas coquilliers vestiges du passé, est un site exceptionnel mais fragile. Ainsi, dans le but de préserver et de valoriser ce patrimoine unique, le gouvernement du Sénégal, par le biais du ministère de la Culture et ses partenaires, a établi le Centre d’Interprétation du Delta du Saloum depuis 2013. Ce centre fonctionne comme une plateforme dynamique pour le partage d'informations, la sensibilisation et la valorisation du patrimoine du Delta du Saloum, aussi bien pour les populations autochtones que pour les visiteurs étrangers. Il abrite un village artisanal, une salle de fête, un centre multimédia communautaire (CMC), un bureau d’information touristique, un foyer des femmes, une case des tout-petits, lieu d'apprentissage pour les enfants du village, et le Club Nature. Ce dernier est une initiative éducative qui vise à sensibiliser les jeunes comme Aïssata à l'importance de la protection des sites du patrimoine mondial, et de l’environnement.
Nous travaillons avec les établissements scolaires et les universités sur des activités pédagogiques qui sensibilisent sur l’importance de la préservation des amas coquilliers millénaires du Delta du Saloum, qui ont une valeur universelle exceptionnelle.
Grâce à l’UNESCO,le centre d’interprétation que dirige M. Diouf abrite un musée entièrement équipé, dont la vocation est d’informer les visiteurs qui arrivent sur le site. Il a participé à former plus d’une cinquantaine de guides touristiques qualifiés, issus de la communauté, certains ayant réussi à mettre en place des campements touristiques dont les retombés économiques profitent à la population locale.
Impliquer les communautés pour préserver les sites du patrimoine mondial
En plus de l’engagement des structures de gouvernance et des Etats, celui des communautés pour préserver les sites du patrimoine mondial est primordial. Cela est d’autant plus urgent, face aux changements climatiques, aux conflits, à l’insécurité et aux risques de catastrophes naturelles dans la région de l’Afrique de l’Ouest.
Au Parc National de Niokolo-Koba, situé à environ 650 km à l'est de Dakar dans la région de Tambacounda, inscrit sur la Liste du patrimoine mondial depuis 1981 et sur la liste du patrimoine mondial en danger depuis 2007, l’implication des communautés qui bénéficient des retombées du site est un bel exemple. Par une approche holistique et une étroite collaboration, les communautés autour du site, organisées en associations de femmes et de guides touristiques, appuient les efforts de la Direction des Parcs Nationaux (DPN) dans la gestion et la gouvernance du parc. Les populations participent aux travaux d’aménagement de celui-ci et certains guides autochtones sont recrutés.
Ainsi, les associations de femmes participent activement à la conservation de ce site. Cette initiative illustre la responsabilité partagée et les bénéfices mutuels d'une implication communautaire complète dans la gestion de ses trésors culturels et naturels.
L'Afrique sous-représentée sur la liste du patrimoine mondial
L'Afrique est sous-représentée sur la Liste du patrimoine mondial de l'UNESCO. Malgré l'ampleur et la diversité du patrimoine culturel et naturel de celle-ci, seulement 12% des sites mondiaux répertoriés sur la liste sont situés sur le continent. Actuellement, un total de 98 sites en Afrique y est inscrit. Cependant, la région fait face à des défis significatifs car un pourcentage alarmant de ces sites désignés - environ 39% - est simultanément placé sur la Liste du patrimoine mondial en péril. Parmi les 15 biens africains considérés comme en péril, 11 sont inscrits comme biens naturels et 4 comme biens culturels. L’Afrique de l’Ouest en particulier en compte 6 dont 3 biens culturels et 3 biens naturels.
L’UNESCO, à travers la Priorité Afrique (2022-2029), a mis la promotion du patrimoine culturel et le développement des capacités au cœur de ses actions prioritaires, en collaboration avec le Fonds du patrimoine mondial africain (FPMA) et les Organisations consultatives (ICCROM, ICOMOS, et UICN). La Stratégie globale pour développer l’état de conservation souhaité en vue du retrait des biens de la Liste du patrimoine mondial en péril (DSOCR) dans la région Afrique, est prometteuse, et bénéficie de l’accompagnement des Etats parties, comme au Sénégal.